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Nettoyons la commune
du 12/11/2020
 Histoire et Patrimoine d' Archigny - 170 articles  

Patrimoine

     Dans notre dernière édition relative à la nécessité de « nettoyer la campagne », nous avions évoqué un phénomène inexpliqué autour des pierres du soi-disant dolmen de la Font-de-l’Étang. Des fouilles aux archives et des observations nous ont permis de clarifier un certain nombre de choses, tant sur l’origine de ces pierres que sur la disparition épisodique de la végétation qui les entoure.

Végétation autour du dolmen et vue d’une partie du Tré-Paysan

Tout d’abord, aussi surprenant que cela puisse paraître, les pierres en place appartiennent bien à un ancien dolmen. Nous avons été surpris, car ce n’est qu’avec un regard de croyant ou d’archéologue que l’on peut retrouver la table, cassée d’ailleurs et les pieds de ce qui a effectivement pu être un dolmen. Pourtant, nous avons trouvé trace de cette stèle (– 5 000 à – 2 000 ans) dans le cartulaire du Grand Gautier qui date de 1309 ! Ce n’est évidemment pas notre dernière édition (1). On comprend mieux pourquoi tout semble oublié. On y parle de la « petra sopeyze du Tré Paisan » près des « némus de Poysen ». Les indigènes connaissent bien le Tré-Paysan. « O l’té des coins couverts de palouenne, tout juste bons pour les vaches à l’automne quand on peut pu aller dans les fonds, y a qu’les d’ssus qu’étiont cultivés » nous a-t-on dit.

Extrait du relevé cadastral de 1964 autour de la Font-de-l’Étang

En 1954, C’est dans un courrier à l’inspecteur d’académie qu’un élève, président de la coopérative scolaire d’Archigny, dit l’avoir « découvert avec la maitresse ». Le mégalithe était alors en état.

Puis vers 1957, la source de la Font-de-l’Étang fut choisie pour alimenter le réseau de l’adduction d’eau. C’est à cette époque que des « excités du bulldozer » ont tout  brassé. Le dolmen aurait alors été renversé. Nous avons entendu dire que monsieur Jean Hélion, de Jolines, propriétaire des terres environnantes, aurait heureusement arrêté le massacre.

On peut donc, sans trop de risques, affirmer que ces pierres appartiennent à un dolmen qui était debout il y a une soixantaine d’années. D’ailleurs une célèbre association se consacrant au patrimoine d’Archigny n’a pas hésité à le prendre pour emblème.

Mais chose intéressante, dans le même courrier à l’inspecteur évoqué précédemment, il est question d’un « escalier profond » et de « l’entrée étroite d’un puits ». Autant de remarques qui font penser à un lieu habité mais par qui ? Les fadets ont toujours aimé les abris souterrains.

Finalement, à ce niveau de nos recherches, les arguments favorables aux fadets d’Archigny n’ont fait que se multiplier. Nous avions envie de certitudes, d’autant qu’après les pluies d’étoiles filantes de ces derniers jours, proches des broussailles couvrant les pierres du dolmen, nous avons observé des traces au sol laissant présager une présence ou un passage. N’écoutant que notre courage, nous nous sommes mis en observation aux heures prisées par les fadets : en soirée et au lever du soleil.

Les pierres du dolmen vues de notre poste d’observation

Notre patience a été enfin récompensée samedi matin. Aux aurores, nous avons vu arriver, tranquillement, un bipède muni d’une petite débrousailleuse. Le Fadet n’était même pas un fada mais un discret et même un grand discret : Guy Savigny. Il est bien connu à Archigny comme étant celui qui a constitué depuis son enfance la plus impressionnante collection de pierres taillées (quelques milliers !) toutes ramassées sur la commune (2). Des pierres taillées au dolmen, il n’y a qu’un pas. Mais toujours discret, beaucoup ignoraient ses interventions régulières. « On ne peut pas laisser ça comme ça ! » nous dit ce passionné d’histoire. « C’est trop important ! ». Le discours s’arrête là car il faut faire place à l’action.

Il nous a permis quelques photos.

Méthodiquement, les allers et venues de la débroussailleuse découvrent les pierres du dolmen.

Brève pose pour la photo à la fin du chantier mais le travail reprend pour couper le chaume aux alentours : « ça fera quand même plus joli » nous dit-il.

Vue d’ensemble des pierres du dolmen

Nous avions rêvé de fadets et d’arguments touristiques, mais la réalité est bien plus sympathique. C’est celle des acteurs de l’ombre qui œuvrent pour conserver et mettre en valeur notre patrimoine. Le promeneur avisé ne pourra que profiter de cette initiative car désormais le dolmen se voit du chemin menant à la Font-de-l’Étang.

Vue du chemin de la Font-de-l’Étang sur le dolmen

Bien qu’il n’ait que 80 printemps, Guy s’inquiète : « tant que je pourrai… mais après ? »

Après ? Un seul exemple, disait Confucius, produit plus d'effet que cent volumes d'exhortations ou de menaces.

Saluons l’exemple (3) et soyons confiants dans nos collectivités qui font de plus en plus pour le tourisme … ou dans un autre fada !

 

De notre envoyé spécial JCC

 

  1. Note de la rédaction : Les données historiques nous ont, entre autres, été confiées par la dynamique présidente de la non moins dynamique association « Histoire et Patrimoine d’Archigny » qui a ce fameux dolmen pour emblème.

  2. Note de la rédaction : Cette collection, ramassée sur une même zone et couvrant plusieurs dizaines de milliers d’années (- 400 000 à – 2 000 ans), est particulièrement intéressante pour les archéologues et ceux du Grand-Pressigny ne s’y sont pas trompés.

  3. Note de la rédaction : nous recevons à l’instant un message de la présidente d’HPA qui précise que Guy Savigny, membre de l’association, effectue en toute discrétion, mais avec un zèle tout particulier, cette mission de nettoyage du dolmen depuis la fondation de l’association et qu’elle l’en remercie vivement.

 

 

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